Diamonds And Pearls est le quatorzième album de Prince. Il est le premier à être attribué à Prince and The New Power Generation. Il est paru sous la forme d'un double album vinyle, simple CD, et simple K7 le 1er octobre 1991 chez Paisley Park Records / Warner Bros.

Genèse[]
Parmi les grandes stars des années 1980, Prince est le roi incontesté de la production discographique. En dix ans il a produit dix albums, dont trois sont des double albums vinyle (1999, Sign O' The Times, et Graffiti Bridge). Au total, il a vendu environ 30 millions d'albums. Seul Michael Jackson parvient à faire mieux, avec deux albums (Thriller, en 1982 et Bad en 1987) qui se sont écoulés à plus de 40 millions d'unités sur la même période. Madonna, qui est arrivée plus tard, a vendu avec ses trois albums, Like A Virgin (1985), True Blue (1986) et Like A Prayer (1989) un total de 16 millions d'exemplaires.
Malgré tout, la fin de la décennie voit arriver l'émergence d'une nouvelle génération, notamment dans la mouvance R&B / Soul / New Jack qui redonne de l'intérêt à la musique noire. On voit apparaître des disques de producteurs (Jimmy Jam & Terry Lewis, LA Reid & Babyface...), et le hip-hop se démocratise avec une musique moins ambitieuse, à base de samples, et des textes souvent simplistes (ex. MC Hammer) qui parfois, affichent une violence et une dureté inédites, et qui font passer pour gentillet les textes à scandale de Prince.
D'autre part, avec le coup manqué du Black Album et l'urgence de la création de la bande originale de Batman, Prince a continué à délaisser son audience afro-américaine qui ne se reconnait pas dans Parade ou dans Lovesexy.
Le salut viendra du nouveau groupe de Prince, qui se met en place à partir de 1989 avec l'arrivée de Michael Bland à la batterie. Le départ fin 1990 du vétéran Dr Fink, qui était présent depuis les débuts en 1978, a permis la création des New Power Generation, un "big band" au feeling essentiellement "black", avec un personnel totalement renouvelé. Dans la première version de ce groupe sont intégrés également un trio de danseurs / rappers appelés les Game Boyz, qui vont pouvoir livrer une image à la fois rajeunie et contemporaine, adaptée à l'émergence rapide du hip-hop sur les chaines de TV musicales comme MTV ou VH-1.
Enregistrement[]
Les premiers morceaux créés pour Diamonds And Pearls sont le morceau-titre et Live 4 Love, enregistrés en décembre 1989 à Paisley Park, c'est à dire bien avant que Graffiti Bridge (paru en août 1990) ne soit effectivement terminé. Cependant à ce stade, il n'y a pas de projet d'album précis. C'est seulement en juin 1990, alors que Prince était en séjour à Londres pour le Nude Tour, que trois nouveaux morceaux furent créés : Daddy Pop, Walk Don't Walk, et Schoolyard. Une autre session studio eut lieu au Japon, en septembre 1990, pour Willing And Able, Strollin, et Money Don't Matter 2-Night. La plupart de ces enregistrements sont toutefois juste des pistes de base, qui seront considérablement embellies et complétées à Paisley Park ensuite.
En septembre 1990, Prince enregistre à Minneapolis les morceaux Horny Pony, Something Funky (This House Comes), The Flow et Jughead. Les trois derniers titres voient la participation de Tony M., dont Prince a découvert les talents de rapper pendant le Nude Tour. D'ailleurs, le rap de The Flow avait été joué en live pendant le Nude Tour sur certains concerts, inséré à la fin de The Future. En séjour à Los Angeles en octobre 1990 pour travailler sur le maxi du morceau New Power Generation, Prince en profite pour enregistrer le morceau Insatiable aux studios Larrabee. Un peu plus tard, de retour à Paisley Park, Prince enregistre un titre intitulé Glam Slam '91, qui ne figurera pas sur l'album mais contient déjà la quasi-totalité des paroles du morceau Gett Off.
Une première configuration de l'album Diamonds And Pearls est assemblée le 27 novembre 1990, soit près d'une année avant sa sortie en version définitive. A ce stade, l'album présente déjà la trame générale de l'album final malgré plusieurs particularités et d'autres morceaux encore absents. La plupart des titres qui subsisteront sur l'album final seront remixés ou retravaillés ultérieurement, notamment en augmentant les participations de Rosie Gaines ouTony Mosley. Une configuration remaniée et plus complète encore (13 titres au lieu de 11) est assemblée en décembre 1990. Elle comporte alors cinq titres qui seront écartés de la version finale : Schoolyard, Something Funky (This House Come), Call The Law, The Flow et Horny Pony. En mars 1991, une nouvelle version est assemblée et elle correspond déjà au track-listing final de l'album, mis à part que Gett Off n'est pas encore présent, c'est toujours Horny Pony qui y figure. Entre temps, les titres Cream, Push et Thunder ont été enregistrés.
Le morceau Gett Off est enregistré en mai 1991. Prince était si satisfait du résultat qu'il voulu sortir ce single immédiatement. Une vidéo est tournée à la fin du mois de mai à Los Angeles. Sans attendre Warner, un maxi-single vinyle est pressé indépendamment à 1500 exemplaires et envoyé à des DJ ou des radios, le jour de l'anniversaire de Prince (7 juin 1991). Immédiatement, le disque devient un collector très recherché, changeant de main pour plus de $200 ! Le morceau procure un intérêt si rapide que le titre est finalement intégré à l'album Diamonds And Pearls, en remplacement de Horny Pony, qui deviendra la face B du single commercial de Gett Off.
Éditions[]
L'album est paru en double album vinyle, cassette et CD. Une édition en Corée du Sud existe en format simple album. Les premières éditions CD proposaient une pochette avec un hologramme.

Diamonds And Pearls - pochette hologramme
- Side 1:
- Thunder (5:45)
- Daddy Pop (5:16)
- Diamonds And Pearls (4:43)
- Side 2:
- Cream (4:12)
- Strollin' (3:46)
- Willing And Able (4:59)
- Gett Off (4:31)
- Side 3:
- Walk Don't Walk (3:07)
- Jughead (4:56)
- Money Don't Matter 2 Night (4:46)
- Push (5:52)
- Side 4:
- Insatiable (6:39)
- Live 4 Love (6:59)
Analyse[]
Comme ce fut le cas pour Purple Rain, Prince avait conscience que Diamonds And Pearls serait un gros succès. Alors qu'il n'était pas réellement en position de négocier, suite à l'échec de Graffiti Bridge, il est parvenu à faire reprendre confiance aux dirigeants de Warner et à leur faire abandonner (ou tout du moins, retarder) la mise en oeuvre d'une compilation best-of qu'ils souhaitaient sortir en 1991. Dès le mois de juin, il fait la tournée des conventions de professionnels du disque qui se révélèrent enthousiastes vis à vis de l'album. Durant l'été, le single Gett Off est numéro 1 au Billboard Hot Dance, et entre dans le Top 10 de nombreux charts à travers le monde. En septembre, le deuxième single extrait en avance de l'album, Cream, est classé n°1 au Billboard Hot 100 ce qui en fait le 5ème n°1 généraliste de Prince (après When Doves Cry, Let's Go Crazy, Kiss, et Batdance).
Accessible, exubérant et enjoué, Diamonds And Pearls donne le sentiment de retrouver l'énergie et l'évidence de Purple Rain. On se dit qu'on retrouve le meilleur de Prince, mais en même temps Prince n'a jamais sonné auparavant comme cela. Les morceaux de premier ordre sont nombreux : Gett Off et Cream, bien sur, mais aussi Money Don't Matter 2-Night et Live 4 Love sont des classiques. L'album propose des directions musicales assez nouvelles chez Prince, au delà du hip-hop. Strollin' est un rafraichissant morceau jazzy, Walk Don't Walk affiche un côté pop joviale pas déplaisant même si à l'époque de la sortie de l'album les bruits de klaxons avaient fait débat dans la communauté des fans. Thunder est construit sur une mélodie orientale, et Willing And Able est une profession de foi parfois vue comme un hommage à Bob Marley, même si l'on reste éloigné du reggae.
Le disque donne la part belle au hip-hop avec la participation de Tony Mosley, également mis en avant dans les clips vidéos. On trouve des raps ou apparitions sur Daddy Pop, Willing And Able, Gett Off, Jughead, Push, et Live 4 Love. Cette nouveauté peut surprendre si l'on fait référence au titre Dead On It sur le Black Album, dans lequel Prince se moquait du manque de musicalité des rappers. Si cette évolution permet d'apporter une audience contemporaine à Prince, les fans de la première heure apprécient moins ce revirement.
Le chapitre de la romance sensuelle est détenu par Insatiable, tandis que le morceau titre est une ballade plus classique.
Autre nouveauté, les musiciens de Prince participent réellement à l'album. Jamais Prince n'avait laissé autant de parties musicales pour des enregistrements en studio. Levi Seacer Jr, Tommy Barbarella, Michael Bland et Sonny Thompson jouent sur la quasi totalité des morceaux, et sont aussi mis en avant dans les clips. Rosie Gaines chante en duo ou en background sur la quasi totalité des titres, procurant un contrepoint de qualité aux parties vocales de Prince.
Du côté des paroles, on note aussi un réel changement. Exit les messages cryptiques et spirituels de Graffiti Bridge. Si la religion reste présente (l'intro de Thunder cite le nom de Jésus), elle n'est plus l'élément central de l'album. On en revient même aux bonnes vieilles recettes : Gett Off et Cream pour ne citer qu'eux, parlent de sexe chacun à leur manière. Au global, l'album affiche une virilité machiste, renforcée par la présence de Diamond et Pearl, deux danseuses d'apparence presque jumelles, et présentes en duo sexy sur la pochette de l'album et dans les clips.
L'aspect "société" n'est pas oublié pour autant, et il faut remonter à Controversy (encore une fois) pour trouver un disque de Prince qui aborde autant de sujets proches de la rue. Dans Walk Don't Walk, Prince procure des conseils de bonne conduite. Sur Money Don't Matter 2-Night, il est question de la suprématie du pétrole et de l'oppression des populations. Dans Live 4 Love, Prince prend la place d'un pilote d'avion de chasse, tourmenté par des remords au moment d'appuyer sur le bouton pour larguer les bombes. Bien qu'enregistrée en décembre 1989, donc avant le début de la Guerre du Golfe, Live 4 Love sonne terriblement actuelle au moment de la sortie de l'album.
Au global, Diamonds And Pearls est l'album le plus black / soul / R&B / funk de Prince depuis 1999. Prince a fait preuve d'une énergie immense lors de la promotion du disque, prodiguant des clips vidéo de qualité, et des apparitions TV devenues mythiques, au Arsenio Hall Show et aux MTV Video Music Awards.
Singles[]
Du fait de son succès l'album a produit de nombreux singles. En face B, le titre Horny Pony est un inédit des sessions de Diamonds And Pearls, qui devait figurer sur l'album mais a été écarté à la dernière minute au profit de Gett Off. Il est d'ailleurs intéressant de signaler que Gett Off s'écrit avec deux T pour le différencier du morceau Get Off sorti l'année précédente sur le maxi single du titre New Power Generation. Le titre Call The Law est issu des mêmes sessions. Q In Doubt est une des variations/remixes parues sur le maxi-single de Cream. I Love U In Me était déjà la face B du single The Arms Of Orion extrait de l'album Batman.
Cette époque marque l'apparition de nombreux remixes et variations parues sur les maxi-singles européens et américains. Pour Gett Off, il existe au total une dizaine de versions différentes de la chanson, plus des variations qui deviennent des morceaux à part entière : Violet The Organ Grinder, Gangster Glam et Clokin' The Jizz. Le même principe est appliqué pour Cream qui voit également ses propres variations (Do Your Dance) déclinées en remixes (Q In Doubt, Housebangers, Ethereal Mix). Les maxi suivants sont toutefois plus classiques.
- 7" singles / CD singles
- Gett Off / Horny Pony
- Cream / Horny Pony
- Insatiable / I Love U In Me
- Diamonds And Pearls / Q In Doubt
- Money Don't Matter 2-Night / Call The Law
- Willing And Able / Willing And Able [promo only] US
- 12" singles / CD maxi-singles
- Gett Off (Damn Near 10 mn) [promo only] US
- Gett Off (Extented Remix 8:31) - Gett Off (Houstyle 8:20) - Violet The Organ Grinder (4:59) - Gett Off (Flutestramental 7:26) - Gangster Glam (6:04) - Clocking The Jizz (Instrumental 4:51) US
- Gett Off (Urge Mix 8:25) - Gett Off (Thrust Mix 9:28) DE, UK
- Cream / Horny Pony / Gangster Glam DE, UK
- Cream (Album Version 4:12) - (N.P.G. Mix 5:47) - Things Have Gotta Change (Tony M. Rap 3:57) - 2 The Wire (Creamy Instrumental 3:13) - Get Some Solo (1:31) - Do Your Dance (KC's Remix 5:58) - Housebangers (4:23) - Q In Doubt (Instrumental 4:00) - Ethereal Mix (4:43) US, DE
- Diamonds And Pearls (LP Version 4:45) - Housebangers (4:23) - Cream (N.P.G. Mix 6:16) - Things Have Gotta Change (Tony M. Rap 3:57) DE, UK
- Money Don't Matter 2 Night (LP Version 4:48) - Push (LP Version 5:56) - Call The Law (Non-LP 4:19) DE, UK
- Thunder - Violet The Organ Grinder (4:59) - Gett Off (Thrust Dub) [picture disc] UK
- Insatiable (Edit 4:01) - Insatiable (6:37) [promo only] US
Critiques[]
Comme c'est souvent le cas avec les albums à fort succès commercial, les critiques ne furent pas excellentes. Bien entendu, Diamonds And Pearls fut jugé supérieur à Batman ou Graffiti Bridge, mais en dessous de la meilleure production de Prince des années 1980. La présence de Tony Mosley et l'inclusion du rap a été l'objet de nombreuses critiques, tant par la presse que par les fans. Beaucoup ont pensé que Prince avait fait ce choix dans le but délibéré de vendre plus de disques, tournant ainsi le dos à son intégrité musicale.
Performances commerciales[]
Diamonds And Pearls est le deuxième plus important succès de Prince, après Purple Rain. Les ventes mondiales se sont montées à plus de six millions d'exemplaires, dont 2 aux Etats-Unis. L'album fut classé numéro 3 au Billboard Pop Chart, et numéro 1 dans le chart R&B. Quatre des singles extraits de l'album sont entrés dans le Top 30 US, ce qui n'était pas arrivé depuis Purple Rain. Il fut également n°1 en Australie, et n°2 en Grande-Bretagne, où il fut triple disque de platine (900 000 exemplaires). Il fut aussi un énorme succès en France, qui est le deuxième marché pour l'album en dehors des Etats-Unis, avec 600 000 unités vendues.
Héritage[]
Album bardé de hits, Diamonds And Pearls est régulièrement joué en concerts lors des tournées successives. Le Diamonds And Pearls Tour du printemps - été 1992 a eu lieu en Australie, au Japon, et en Europe, et a largement concerné l'album. Par la suite, Cream, Gett Off, Diamonds And Pearls, Money Don't Matter 2-Night, et Insatiable sont des titres régulièrement joués en concert.
Il est intéressant de constater à quel point cet album est symbolique de l'évolution de l'industrie du disque, au début des années 1990. La qualité intrinsèque de la musique est ici mise de côté, au bénéfice d'artifices qui font vendre. D'un côté, Prince a considérablement travaillé pour faire de ce disque un succès, alors que de l'autre l'album a été une forme de déception pour ceux qui adulaient Prince dans les années 1980. Cependant, il a permis aussi de conquérir une nouvelle base de fans et d'assurer la continuité de la carrière de Prince dans les années qui ont suivi.